8 mars 2023 : Delphine Gardère salue des avancées dans la lutte pour le droit des femmes

8 mars 2023 : Delphine Gardère salue des avancées dans la lutte pour le droit des femmes

La PDG de la Société du Rhum Barbancourt, Delphine Gardère, a profité de la 46e journée internationale des droits de la femme pour saluer les efforts consentis dans la lutte pour le respect des droits des femmes. Condamnant les abus et autres situations défavorables aux femmes, elle appelle à la poursuite du combat afin que la société puisse bannir les discriminations liées au sexe.

8 mars 1977- 8 mars 2023, 46 ans depuis l’adoption par l’assemblée générale des nations unies de la résolution enjoignant les membres à célébrer une journée des nations unies pour les droits des femmes et la paix internationale. Il est indéniable que depuis l’adoption de cette résolution, il y a eu des avancées dans la lutte pour les droits des femmes à travers le monde.

Je vous invite en ce jour à penser à toutes ces femmes, pionnières qui ont joué ou qui continuent à jouer un grand rôle dans tous les secteurs d’activités, modèles pour les petites filles. L’apport de Rigoberta Menchû, de Ellen Johnson Sirleaf, de Toto Bissainthe, de Gaëlle Bien-Aimé et de toutes les membres de Nègès Mawon à leurs communautés n’a pas encore été évalué. Nos sociétés modernes seraient-elles ce qu’elles sont aujourd’hui sans l’apport inlassable de ces héroïnes, qui ont su préserver la flamme vacillante de l’espoir en des lendemains qui chantent ?

Mais y a-t-il vraiment aujourd’hui matière à commémoration ? Comment célébrer quoi que ce soit dans ce contexte délétère marqué par une insécurité grandissante, surtout pour les femmes ? Tout haïtien et haïtienne souffre aujourd ‘hui d’un profond désarroi et d’une volonté de s ‘évader de cet enfer qu’est devenu notre pays. Alors doit-on commémorer la journée des droits de la femme en ce 8 mars ?

Ma réponse est évidemment positive. Plus que jamais, la lutte pour le respect des droits des femmes est cruciale en Haïti qui connaît chaque jour des crimes terribles, commis en masse contre nous les femmes. Notre présence en nombre aujourd’hui à la Fondation Barbancourt en est une preuve éloquente. C’est la manifestation de notre foi dans un avenir plus propice pour les femmes et les jeunes filles de ce pays, à qui, le moment venu, notre génération devra passer le flambeau.

Il y a 6 ans cette année, le décès de mon père me projetait sans ménagement dans la dure réalité de la femme haïtienne. Le 1er mars 2017, alors que ma vie qui se déroulait jusque-là dans une grande métropole d’Europe, mon existence a brusquement changé avec un appel téléphonique m’annonçant le décès de mon père. Pour moi, il n’y avait pas lieu d’hésiter une seconde. Ma place était en Haïti, à Barbancourt, dans cette entreprise avec ces gens que mon père considérait comme sa famille. Vous permettrez que j’exprime, en ce jour de la femme, ma reconnaissance à celui qui a été mon appui. mon rocher dans tous mes combats. Vous aurez certainement compris que je parle de mon mari qui n’a pas hésité à me suivre dans mon pays.

Avec le recul, je me demande souvent, si les choses auraient été différentes, si j’avais été un homme? Car, mes amis, sans nous voiler la face, ni faire la politique de l’autruche, la société haïtienne dans toutes ses composantes accepte difficilement la réalité de la lutte des femmes. Certes, il y a eu des avancées et les femmes exercent de nombreuses professions ou occupent de nombreuses fonctions réservées pendant trop longtemps aux hommes. Cependant, il semble exister, jusqu ‘à présent, dans notre société un plafond de verre qui interdit la présence, sinon marginale, des femmes dans les sphères de décision. Un recensement sommaire nous montre que très peu d’ entreprises parmi les 20 plus grands contributeurs fiscaux sont dirigées par des femmes.

Dans ces conditions, il n’est guère surprenant que les femmes subissent, au sein d’institution publique ou privée, de nombreuses violences, notamment sexuelles. Se pensant légitimés par leur position dominante, certains machos invétérés imposent aux femmes des rapports non consentis, doublés de différents types de harcèlement, qu’ils justifient sous l’angle de relations amoureuses ou romantiques. Ainsi, il ne faut pas se leurrer, la violence faite aux femmes n’est malheureusement pas l’apanage des membres des gangs mais touche tous les échelons de la société restés sclérosés dans des mœurs d’un autre temps.

Ce 8 mars 2023 arrive à une période spéciale de notre histoire nationale. Loin d’être une journée de réjouissance, ce 8 mars 2023 est beaucoup plus une journée de réflexion, une halte pour faire le bilan de la situation des femmes, et de la lutte pour l’égalité, et contre les violences basées sur le genre. Pourquoi doit-on continuer la lutte pour le droit des femmes, particulièrement en Haïti ? En tant que cheffe d’entreprise, épouse et mère, je me dois d’embrasser cette lutte à bras le corps afin d’être un modèle pour mes deux filles. Je veux leur montrer que leur condition de femme, ne peut en aucun cas être un obstacle à la réalisation de leurs rêves. Je tiens aussi également à exprimer ma gratitude et mon admiration à mes nombreuses et dévouées collaboratrices qui font partie de cette lutte, à mes côtés, chaque jour.

J’espère que grâce à notre combat mes enfants et les filles de leur génération connaitront Haïti débarrassée des scories de la violence faites aux femmes, Où leurs aptitudes et leurs rêves ne seront pas limités par leur condition de femme.