Alors que depuis le deuxième lundi de 2020, soit le 13 janvier dernier, la Chambre des députés est caduque et le Sénat est dysfonctionnel à cause de la non-tenue des élections, le pays connaît une situation dans laquelle il n’y a pas de contre-pouvoir pour contrôler l’action de l’Exécutif. Dans un autre contexte, l’Exécutif est
Alors que depuis le deuxième lundi de 2020, soit le 13 janvier dernier, la Chambre des députés est caduque et le Sénat est dysfonctionnel à cause de la non-tenue des élections, le pays connaît une situation dans laquelle il n’y a pas de contre-pouvoir pour contrôler l’action de l’Exécutif. Dans un autre contexte, l’Exécutif est lui-même dysfonctionnel à cause de l’absence d’un Premier ministre et d’un gouvernement légal et légitime. Cet état de fait qui s’apparente à une anarchie était plutôt prévisible !
Beaucoup de discussions s’enflamment depuis ce 13 janvier 2020 sur le dysfonctionnement du Sénat de la République qui se réduit à 10 Sénateurs et la caducité de la Chambre basse, vu que le mandat de la totalité des Députés est échu. Certains leaders d’opinion et anciens Sénateurs n’acceptant pas l’évidence, attribuent cette responsabilité à Jovenel Moïse pour n’avoir pas réalisé les élections législatives qui ont été prévues pour le mois d’octobre dernier. Mais cette problématique n’est pas une apparition, mais plutôt une prévision… Nous avons tous su que le 13 janvier 2020, le Parlement serait dysfonctionnel si les élections législatives n’avaient pas été possibles.
En effet, la Constitution en vigueur pose déjà les responsabilités et fixe les échéances pour la réalisation des élections au pays en ses articles 90.1 à continuer pour la Chambre des députés et 94 à continuer pour le Sénat.
Toutefois, l’article 136 qui se lit : « Le Président de la République, Chef de l’État, veille au respect et a l’exécution de la Constitution et a la stabilité des institutions. Il assure le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État », impose au Chef de l’État la responsabilité de la bonne marche des institutions étatiques. Mais en dépit de ces dispositions constitutionnelles, fort est de constater que les élections devant renouveler le personnel politique n’ont pas eu lieu en 2019. Ce qui signifierait que, de fait, Jovenel Moïse n’a pas assuré la stabilité des institutions qui devraient passer par des joutes électorales.
Cependant, une autre lecture du contexte qui prévaut en Haïti semble s’imposer. D’ailleurs, certains analystes politiques avaient préalablement mis en question la faisabilité des élections d’octobre 2019.
Lire aussi : 2019 : Les élections parlementaires seront-elles possibles ?
Mais par contre, la question perdure : À qui doit-on attribuer l’absence du pouvoir législatif aujourd’hui dans le pays ?
Pour parvenir à une ébauche de réponse, un simple survol dans un passé très proche nous serait donc nécessaire :
1- La trahison de Jean-Henry Céant
Alors que dans son bilan présenté lors de la cérémonie d’ouverture de l’année législative, en janvier 2019, Jean-Henry Céant avait souligné les avancées enregistrées dans trois grands dossiers tels : PetroCaribe, les élections et la remontée de l’insécurité dans le pays, pourtant il a fallu du temps à certains esprits avisés de comprendre que le Premier ministre était plutôt en train de contribuer à la destitution de Jovenel Moïse. Ainsi, la contribution de Jean-Henry Céant à la crise politique a largement retardé le processus électoral qu’il devait lui-même entamer.
Lire aussi : Violence en Haïti : Pourquoi le chef du CSPN, Jean-Henry Céant ne se prononce-t-il pas ?
2- L’irresponsabilité du Parlement lui-même
On se rappelle des séances avortées au Parlement, alors que le vote du projet de loi électorale figurait à l’ordre du jour, sans oublier le fait que le pays fonctionne encore sur la loi de finances de l’exercice 2017-2018. Le budget 2018-2019 n’a jamais été voté. À cela ajoutons l’échec, au Sénat de la République, de la ratification de déclaration de politique générale de deux Premiers ministres nommés, soit Jean Michel Lapin et Fritz William Michel, à cause des perturbations survenues à la salle de séance.
Plus loin, trois mois de paralysie totale des activités (Pays Lock) ont renforcé la situation chaotique qui existait déjà au pays. Et, cet état de chaos a été initié, par des Sénateurs bel et bien connus comme Nenel Cassy, Evalière Beauplan, Youri Latortue, Antonio Cheramy (Don Kato) et autres.
3- Le financement du mouvement “Pays Lock” par des membres du Secteur privé
Ce n’est plus un secret pour personne que certains éléments du secteur dit privé finançaient les manifestations contre Jovenel Moïse et les campagnes de dénigrement lancés contre le régime au pouvoir. C’est un conflit qui ne part pas d’aujourd’hui si on se rappelle les circonstances de l’arrestation de Clifford Brandt.
Ainsi, Dimitri Vorbe n’a pas caché son soutien et son financement au mouvement PetroCaribe Challenge, autant que Réginald Boulos n’a pas voilé sous large soutien au mouvement Pays Lock, au point d’avoir même financé une milice privée pour sécuriser les manifestations.
4- L’incitation à la violence que prônaient certains Médias du pays
Si par solidarité médiatique on s’abstient de dénoncer ouvertement certains médias qui ont largement laissé le cadre de l’éthique du métier de la presse pour se plonger dans un fanatisme démesuré, au point de lancer le peuple à explorer les contours de ses plus bas instincts, mais la mémoire des faits perdurent encore. Et aujourd’hui, on ne peut guère négliger l’influence du secteur médiatique sur la politique.
Nul de ces acteurs sus-cités ne peut prétendre ne pas être impliqué dans l’aggravation de la crise politique aujourd’hui, alors que le Président lui-même se lançait dans un processus de dialogue national.
Alors, s’il est vrai que le constat de l’échec du Président de la République à ce sujet est patent, il n’en demeure pas moins qu’il avait pris des initiatives pour aboutir à la réalisation des élections, comme la prévision de la somme de trois milliards de gourdes, dans le budget 2018-2019, pour la réalisation des élections.
Ainsi, notre interrogation de départ persiste : Si le Parlement haïtien est aujourd’hui dysfonctionnel, qui est, ou qui sont les responsables ?
Par :
Stevens Grégor Gabriel, dit L’Archange
Jean Jocelyn Petit
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