En cartes : soixante-dix ans d’assassinats ciblés par Israël

En cartes : soixante-dix ans d’assassinats ciblés par Israël

Barbancourt le rhum des connaisseurs La pratique de l’élimination ciblée est une constante de la stratégie israélienne qui précède même la création d’Israël, en 1948. Au cours de son histoire, grâce au développement de sa technologie militaire et au perfectionnement de ses agences de renseignement (comme le Shin Beth et le Mossad, les services du renseignement

Barbancourt

le rhum des connaisseurs

barbancourt

La pratique de l’élimination ciblée est une constante de la stratégie israélienne qui précède même la création d’Israël, en 1948. Au cours de son histoire, grâce au développement de sa technologie militaire et au perfectionnement de ses agences de renseignement (comme le Shin Beth et le Mossad, les services du renseignement intérieur et extérieur), Israël a pu mener des opérations complexes et de plus en plus éloignées, en employant des moyens divers (attaques par missiles tirés d’hélicoptères ou de drones, snipers, charges explosives dissimulées…). Ces exécutions extrajudiciaires ont permis à l’Etat hébreu de tuer des individus considérés comme une menace pour sa sécurité, sans impliquer ouvertement ses forces et engager ainsi directement sa responsabilité, mais celles-ci font régulièrement de nombreuses victimes civiles.

Ces assassinats témoignent surtout de l’aptitude d’Israël à frapper ses ennemis où qu’ils soient. Dernier exemple de cette pratique éprouvée : l’élimination, vendredi 20 septembre, d’Ibrahim Aqil, chef de la force Radwan, unité d’élite du Hezbollah, et d’un autre de ses commandants, Ahmed Mahmoud Wehbe, dans un immeuble de Beyrouth, lors d’une frappe qui a fait au moins 31 morts et 68 blessés.

fkremas

Protomaps © OpenStreetMap
X
<!–

Personne enlevée (y compris dépouilles de personnes tuées)

–>

Hamas
Hezbollah
Jihad Islamique
Autres
Clicker sur les points pour
avoir des informations sur les assassinats
près la création de l’Etat d’Israël, la lutte
contre les infiltrés

Fin 1947, après le rejet par les Palestiniens du plan de partage onusien de la Palestine
mandataire en deux Etats, l’un juif, l’autre arabe, la Haganah, l’ancêtre de l’armée
israélienne, lance l’opération « Zarzir ». Confiée à une force d’élite, celle-ci cible
une vingtaine de leaders politiques et militaires palestiniens, basés principalement à Jérusalem
et à Jaffa. Après l’armistice de 1949, la sécurité de l’Etat est menacée par des infiltrations
de fedayins palestinien, orchestrées, au-delà de la « ligne verte », par l’Egypte et
la Jordanie. Dans cette guerre par procuration, quelques mois avant la crise du canal de Suez,
les services de renseignement israéliens mettent en œuvre une double opération qui permet
d’éliminer, à Gaza et à Amman, deux cibles responsables de ces attaques. L’Etat hébreu
développera ensuite ce type d’opération pour tuer les militants et responsables politiques et
militaires des organisations palestiniennes.

  • 17 septembre 1948 – Folke Bernadotte – Diplomate suédois,
    émissaire spécial des Nations unies en Palestine, chargé de la mise en application du partage
    territorial, assassiné avec le colonel français André Sérot, chef des observateurs des Nations
    unies à Jérusalem, dans un assaut du groupe paramilitaire sioniste Lehi (Stern).
  • 11 juillet 1956 – Moustapha Hafez – Colonel de l’armée
    égyptienne, chargé de l’infiltration de commandos palestiniens, depuis la bande de Gaza,
    administrée par l’Egypte, en Israël. Tué par un colis piégé.
  • 11 juillet 1956 – Salah Moustapha – Attaché militaire
    égyptien à Amman, chargé de l’infiltration de commandos palestiniens, de la Cisjordanie, alors
    annexée par la Jordanie, en Israël. Tué par un colis piégé.
  • 8 juillet 1972 – Ghassan Kanafani – Ecrivain et homme
    politique palestinien, il est actif au sein du Mouvement nationaliste arabe, où il édite le
    journal Al-Hurriya, à Beyrouth, puis il devient le porte-parole du Front populaire de
    libération de la Palestine (FPLP). Le 8 juillet 1972, il est assassiné, avec sa
    nièce, lors de l’explosion d’une bombe placée dans sa voiture.
  • 25 juillet 1972 – Bassam Abou Sharif – Dirigeant du FPLP,
    puis conseiller de Yasser Arafat et responsable de la presse de l’Organisation de libération
    de la Palestine (OLP), il est victime d’un livre piégé. Au cours de cet attentat dont il sort
    vivant, attribué aux services israéliens, il perd un œil, une oreille et quatre doigts. Il
    travaille avec Yasser Arafat sur les accords de paix d’Oslo, signés en 1993.
Après l’attentat des Jeux olympiques de
Munich, l’opération « Colère de Dieu »

Le 5 septembre 1972, au onzième
jour des Jeux olympiques (JO) de Munich (Allemagne), le commando palestinien Septembre noir
s’introduit dans les logements de la délégation israélienne, et y tue deux athlètes, avant d’en
prendre neuf autres en otage. L’enlèvement durera toute la journée, et s’achève par un assaut de
la police allemande et la mort de tous les otages, de cinq membres du commando et d’un policier
ouest-allemand. Avec l’aval de la première ministre travailliste, Golda Meir, Israël lance
l’opération « Colère de Dieu », avec l’objectif d’éliminer les membres de Septembre
noir et les combattants de l’Organisation de libération de la Palestine soupçonnés d’être
impliqués dans l’attaque de Munich. La vingtaine d’années suivante, les unités du Mossad
chargées de cette mission tuent, à travers l’Europe, une douzaine de Palestiniens et de
ressortissants de pays arabes. Au Proche-Orient, Israël envahit, en 1982, le sud du Liban,
déchiré par la guerre civile, où les cadres de l’OLP ont trouvé refuge. En réaction à cette
invasion, le Hezbollah, mouvement chiite soutenu par la République islamique d’Iran, est créé.
Le chef charismatique du mouvement, Abbas Moussaoui, est tué, en 1992, par une frappe de
missile menée par des hélicoptères israéliens.

  • Principales cibles de l’opération « Colère de Dieu » :
    16 octobre 1972 – Abdel Wael Zwaiter –
    Représentant de l’OLP à Rome.
    8 décembre 1972 – Mahmoud Hamchari – Représentant du Fatah et
    de l’OLP à Paris. 6 avril 1973 – Basil Al-Kubaïsi
    Universitaire irakien, membre du FPLP, assassiné à Paris.
    9 avril 1973 – Kamal Nasser ; Mahmoud Youssef Najjer ; Kemal
    Adwan –
    Hauts dirigeants du Fatah, assassinés à Beyrouth.
    28 juin 1973 – Mohamed Boudia – Indépendantiste algérien
    engagé pour la cause palestinienne, tué à Paris. 28 mars 1978 – Wadie
    Haddad –
    Cofondateur du FPLP, il aurait été empoisonné par le Mossad en République
    démocratique allemande. 22 janvier 1979 – Ali Hassan Salameh
    Chef des opérations du groupe Septembre noir, tué à Beyrouth.
    8 juin 1992 – Atef Bseiso –Haut responsable du Fatah.
  • 22 mars 1990 – Gerald Bull – Expert balistique canadien,
    ancien employé de la NASA et du ministère de la défense américain, il est engagé, dans les
    années 1980, par le régime de Saddam Hussein, pour concevoir et tester un supercanon pouvant
    atteindre aussi bien Tehéran que Tel-Aviv. Assassiné par balle devant son domicile, à
    Bruxelles.
  • 16 février 1992 – Abbas Moussaoui – Secrétaire général du
    Hezbollah entre 1990 et 1992. Tué par des tirs d’hélicoptères israéliens sur le cortège de
    voitures dans lequel il circulait, dans le Liban sud. Remplacé par Hassan Nasrallah.
L’écrasement de la deuxième Intifada

En septembre 2000, la visite du leader du Likoud et futur
premier ministre Ariel Sharon sur l’esplanade des Mosquées, à Jérusalem, provoque des heurts
entre
Palestiniens et forces de sécurité israéliennes, dans les territoires occupés. C’est le
déclenchement de la
deuxième Intifada. Une vague d’attentats-suicides s’abat sur Israël, doublés d’attaques contre
l’armée et les
colons, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Israël relance sa politique de liquidation de
militants
palestiniens, du Hamas et du Jihad islamique comme du Fatah et du FPLP. Ces assassinats
contribuent à
l’étiolement de la deuxième Intifada. Mais, en alimentant la colère des Palestiniens et en
drainant de
nouvelles recrues vers les groupes armés, ils préparent aussi le terrain pour des attaques
ultérieures.

  • 9 novembre 2000 – Hussein Abayat – Commandant du mouvement
    paramilitaire du Fatah, Tanzim. Il est abattu d’un hélicoptère, alors qu’il se trouvait dans
    une voiture, aux alentours de Bethléem. C’est le premier assassinat ciblé de la deuxième
    Intifada.
  • 27 août 2001 – Moustapha Al-Zibri (Abou Ali Moustapha) –
    Secrétaire général du FPLP, il est tué par un missile tiré sur son bureau de Ramallah, en
    Cisjordanie.
  • Entre 2002 et 2004, Israël élimine les fondateurs du Hamas :
    Salah Chéhadé, leader des Brigades Ezzedine Al-Qassam, branche armée du
    mouvement ; le cheikh Ahmed Yassine, chef spirituel du mouvement, tué
    dans une frappe à la sortie d’une mosquée, à Gaza ; Abdelaziz Al-Rantissi,
    principal porte-parole du Hamas, qui avait survécu à une attaque similaire,
    en 2003.
La lutte contre la bombe iranienne

En juin 2005, Mahmoud Ahmadinejad
remporte l’élection
présidentielle iranienne : il adopte une ligne diplomatique dure sur la question nucléaire,
reprenant les
activités d’enrichissement d’uranium dans l’usine d’Ispahan, et multiplie les attaques verbales
contre Israël,
Etat qui doit être « rayé de la carte ». A partir de 2007, alors que le
programme nucléaire
iranien entre dans sa « phase industrielle », selon Téhéran, plusieurs
scientifiques
iraniens travaillant dans le secteur nucléaire sont tués par des attaques ciblées, attribuées
par l’Iran à
Israël ou aux Etats-Unis. Dans les territoires palestiniens et au Liban, les assassinats ciblés
continuent
d’éliminer des militants des groupes palestiniens, ainsi que du Hezbollah.

  • Entre janvier 2007 et novembre 2020, au moins six
    scientifiques iraniens impliqués dans le programme nucléaire de la République islamique sont
    tués, principalement à Téhéran, dans des circonstances troubles (empoisonnement radioactif,
    bombe magnétique placée par un motard sur les véhicules, guet-apens).
  • 12 février 2008 – Imad Moughniyah – Cofondateur et chef
    militaire du Hezbollah, responsable de plusieurs attentats au cours de la guerre civile
    libanaise (dont ceux contre l’ambassade américaine et ceux contre les casernements américain
    et français à Beyrouth, en 1983). Tué dans l’explosion de son véhicule.
  • 14 novembre 2012 – Ahmed Jaabari – Numéro deux et chef
    opérationnel de l’aile militaire du Hamas. Après avoir échappé à plusieurs tentatives
    d’assassinat de la part d’Israël, dont l’une, en 2004, coûte la vie à son fils, il est
    tué dans une frappe contre sa voiture. Cet assassinat est le premier d’une série d’attaques
    ciblées contre des leaders de haut rang du Hamas et du Jihad islamique à Gaza, au cours de
    l’opération israélienne « Pilier de défense ».
Après l’attaque du 7 octobre 2023 : l’éradication du
Hamas et l’endiguement du Hezbollah

Après l’attaque terroriste perpétrée par le
Hamas sur le
territoire israélien, le 7 octobre 2023 – on dénombre 252 personnes enlevées
et
1 170 morts –, le gouvernement israélien s’engage à éradiquer le mouvement
islamiste
palestinien, ce qui passe par des opérations d’élimination dans la bande de Gaza et au Liban. Le
Hezbollah
ayant ouvert un front dans le nord d’Israël, en soutien aux Gazaouis, des frappes ciblées visent
aussi les
cadres du mouvement chiite libanais, pour le convaincre de cesser ses attaques et de retirer ses
troupes
derrière le fleuve Litani, à 16 kilomètres de la frontière avec l’Etat hébreu.

  • 2 janvier 2024 – Saleh Al-Arouri – Chef du bureau politique
    du Hamas pour la Cisjordanie, tué avec deux chefs des Brigades Ezzedine Al-Qassam, branche
    militaire du mouvement, dans une frappe de drone sur la banlieue sud de Beyrouth. C’est la
    première fois que la capitale libanaise était visée depuis la guerre de 2006 opposant Israël
    au Hezbollah.
  • 1er avril 2024 – Mohammad Reza Zahedi – Général
    iranien du corps des gardiens de la révolution islamique, commandant de la Force Al-Qods
    iranienne pour la Syrie et le Liban. Tué dans une frappe attribuée à Israël contre le consulat
    iranien à Damas, qui fait onze morts.
  • 13 juillet 2024 – Mohammed Deif – Chef de la branche
    militaire du Hamas depuis 2002, il a annoncé le début de l’opération lancée contre Israël, le
    7 octobre 2023. Après avoir échappé a au moins huit tentatives d’assassinat, il a
    été tué dans une frappe israélienne dans la région de Khan Younès, qui a fait au moins 90
    morts et près de 300 blessés, selon le ministère de la santé de la bande de Gaza. Sa mort a
    été annoncée par Israël, le 1er août.
  • 31 juillet 2024 – Ismaïl Haniyeh – Chef du Hamas depuis
    2017, en exil volontaire au Qatar depuis 2019, tué dans un raid israélien dans la capitale
    iranienne, où il s’était rendu pour assister à l’investiture du nouveau président, Masoud
    Pezeshkian.
  • 20 septembre 2024 – Ibrahim Aqil – Chef de l’unité Radwan,
    unité d’élite du Hezbollah – recherché par les Etats-Unis pour son implication dans les
    sanglants attentats anti-américains de Beyrouth en 1983 – tué dans une frappe menée par
    l’armée israélienne dans la banlieue sud de Beyrouth. La même frappe a tué quinze autres
    membres de l’unité, parmi lesquels Ahmed Mahmoud Wahbi, haut commandant qui avait dirigé
    jusqu’au début de cette année les opérations militaires de l’unité en soutien au Hamas
    palestinien.

Il vous reste 0% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Laisser un commentaire

Votre adresse électronique ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont marqués d'un *