Le marathon judiciaire d’Elena Congost pour obtenir la médaille « injustement enlevée » aux Jeux paralympiques

Le marathon judiciaire d’Elena Congost pour obtenir la médaille « injustement enlevée » aux Jeux paralympiques

L’Espagnole Elena Congost (à droite) arrive en troisième position dans le marathon féminin T12 aux Jeux paralympiques, le 8 septembre 2024, à Paris. THIBAULT CAMUS / AP L’image avait d’abord ému le public lorsque la marathonienne espagnole Elena Congost avait soutenu son guide, victime de crampes sévères, juste avant de franchir la ligne d’arrivée en troisième position,

L’Espagnole Elena Congost (à droite) arrive en troisième position dans le marathon féminin T12 aux Jeux paralympiques, le 8 septembre 2024, à Paris.

L’image avait d’abord ému le public lorsque la marathonienne espagnole Elena Congost avait soutenu son guide, victime de crampes sévères, juste avant de franchir la ligne d’arrivée en troisième position, lors du dernier jour des Jeux paralympiques de Paris, dimanche 8 septembre. Puis, l’image avait indigné lorsque l’athlète, déficiente visuelle, avait finalement été disqualifiée pour avoir lâché brièvement le lien qui l’unissait à son accompagnateur, un geste interdit par le règlement. La médaille de bronze était alors revenue à une concurrente japonaise, arrivée quatrième – et trois minutes après l’Espagnole.

Cette décision, jugée par de nombreux observateurs contraire à l’esprit olympique, a suscité l’incompréhension générale, à l’image de la publication mi-octobre d’une tribune par un collectif d’avocats dans L’Equipe.

Bien décidée à récupérer une médaille dont elle estime avoir été injustement privée, Elena Congost est sur le point de s’engager dans un combat judiciaire, comme l’a annoncé, mercredi 23 octobre, le cabinet de conseil Dupont-Hissel, qui la représente : « Elena Congost devra maintenant faire valoir ses droits devant les tribunaux. Nous allons maintenant nous consacrer à la préparation de cette action en justice, qui sera portée devant un juge territorialement et matériellement compétent. »

« Poursuivre des procédures »

Les deux avocats associés, les Belges Jean-Louis Dupont et Martin Hissel, sont reconnus pour être les poils à gratter des grandes institutions sportives. Jean-Louis Dupont est notamment à l’origine de l’arrêt Bosman en 1995, qui avait bouleversé le football en garantissant la libre circulation des footballeurs européens, comme n’importe quel citoyen de l’Union européenne (UE).

Le cabinet réfléchit encore à la meilleure manière de porter l’action en justice mais la décision de principe a été prise. « Face à l’inertie, à l’ignorance et au mépris, nous ne pouvons faire autre chose que de poursuivre des procédures. Nous estimons que notre cliente est en droit d’obtenir ce qui lui a été injustement enlevé », assure Martin Hissel, joint par le Monde. Pour l’avocat, pas question « de jouer le jeu du Tribunal arbitral du sport [TAS], une option totalement exclue à nos yeux. » En matières sportives, les règlements applicables, édictés par les grandes organisations sportives, renvoient en principe vers l’instance basée en Suisse.

Or, pour Me Hissel, le TAS « ne garantit pas aux athlètes le respect et la protection offerts par le droit de l’UE ». L’avocat s’appuie notamment sur un arrêt récent de la Cour de justice de l’Union européenne, rendue en ce sens en décembre 2023 et qui concerne l’Union internationale de patinage. La fédération internationale avait été attaquée par des patineurs qui s’estimaient contraints d’avoir recours au TAS lors d’un litige avec l’instance. Pour Martin Hissel, les sportifs doivent pouvoir « recourir à un juge étatique d’un Etat de l’UE ».

Combat médiatique

Sur le fond, l’avocat belge explique que sa cliente est « extrêmement lucide, posée et sereine ». « Elle est la première à avoir considéré que ce qui lui arrivait était injuste et incompréhensible, indique-t-il. Ce qui pose problème c’est surtout le hiatus entre la grande célébration des Jeux et de ses valeurs pendant un mois, une décision qui vient à contresens et ensuite l’absence totale de réaction. »

Avant d’intenter une action en justice, la marathonienne espagnole et ses avocats avaient d’abord engagé un combat médiatique. Une lettre avait été envoyée – et rendue publique – le 25 septembre au Comité international paralympique, au Comité international olympique, au Comité d’organisation de Paris 2024 et à la ministre française des sports pour appeler au « sens de la justice sportive et de l’équité » afin d’« adopter la seule solution juste (et juridiquement correcte) », à savoir, selon eux, d’accorder à Elena Congost « la médaille qu’elle a légitimement gagnée ».

Ce courrier réclamait une décision « à l’amiable » qui permettrait l’attribution de deux médailles de bronze, « l’attribution de la médaille de bronze à Mme Congost comme à sa concurrente serait la meilleure solution ». Selon le communiqué de presse du jour, seul le Comité international olympique y a répondu, se déclarant « incompétent ».

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