Le policier responsable de l’éborgnement d’un « gilet jaune » en 2019 renvoyé devant la justice

Le policier responsable de l’éborgnement d’un « gilet jaune » en 2019 renvoyé devant la justice

Manuel Coisne, « gilet jaune » éborgné par un tir de grenade lacrymogène non réglementaire à Paris en novembre 2019, ici lors d’une manifestation à Valenciennes (Nord), en décembre 2019. PIERRE ROUANET/VOIX DU NORD/MAXPPP Près de cinq ans après les faits, une juge d’instruction parisienne a décidé de renvoyer un membre d’une compagnie républicaine de sécurité (CRS) devant la

Manuel Coisne, « gilet jaune » éborgné par un tir de grenade lacrymogène non réglementaire à Paris en novembre 2019, ici lors d’une manifestation à Valenciennes (Nord), en décembre 2019.

Près de cinq ans après les faits, une juge d’instruction parisienne a décidé de renvoyer un membre d’une compagnie républicaine de sécurité (CRS) devant la cour criminelle départementale de Paris. Le gardien de la paix T. est accusé d’avoir éborgné un manifestant, Manuel Coisne, 46 ans aujourd’hui, par un tir de lance-grenade Cougar non réglementaire, car réalisé trop bas. Les faits ont eu lieu le 16 novembre 2019 place d’Italie, dans le 13e arrondissement de Paris, à l’occasion du premier anniversaire du mouvement des « gilets jaunes ».

L’enquête, menée par l’inspection générale de la police nationale (IGPN), a permis d’établir que T. est bien responsable du tir de grenade lacrymogène d’environ soixante mètres qui a éborgné Manuel Coisne, en marge d’une manifestation par ailleurs marquée par des incidents. Confronté aux images, le policier a confirmé être le tireur identifié par les enquêteurs.

Sollicité par la juge d’instruction, un expert balistique a pu établir que, pour réaliser son tir, le CRS a incliné son lance-grenade de seulement 18 ° et non des 30 ° à 45 ° préconisés, confirmant les conclusions d’une enquête réalisée par Le Monde quelques semaines après les faits, au mois de décembre 2019.

« Pour paraphraser les termes du rapport de l’expert en balistique, le tir non conforme de T. a transformé le Cougar en “lanceur de balles de défense”, fort dangereux en raison de sa totale imprécision et de l’énergie d’un projectile qui est gros, lourd, rigide et rapide », note la juge d’instruction dans l’ordonnance de mise en accusation rendue mercredi 24 octobre et que Le Monde a pu consulter.

Incohérences dans la formation

Pour la magistrate, ces faits justifient la mise en accusation du fonctionnaire pour « violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente ». En prenant une telle décision, la juge d’instruction est allée à l’encontre des réquisitions du parquet, qui avait réclamé un non-lieu en raison d’un tir considéré comme « conforme au regard de la formation reçue par le mis en cause. »

L’enquête menée par l’IGPN a fait émerger des incohérences dans la formation et la compréhension du fonctionnement du lance-grenade, dont l’usage n’est pas appréhendé à l’identique en police et en gendarmerie. La juge d’instruction note dans son ordonnance que le fabricant, Alsetex, se montre très clair dans son « guide technique à l’usage des utilisateurs du lanceur Cougar » : « Les munitions balistiques (…) doivent être utilisées avec un angle de tir de 30 ° à 45 °. »

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