Les remords tardifs d’un général bosno-serbe condamné pour génocide

Les remords tardifs d’un général bosno-serbe condamné pour génocide

Le général bosno-serbe Radislav Krstic, à La Haye, aux Pays-Bas, le 19 avril 2004. PAUL VREEKER / REUTERS « A chaque instant de chaque jour, je pense aux victimes du génocide de Srebrenica, je les pleure et je prie pour leurs âmes. » Les mots sont inscrits en bleu sur du papier d’écolier, d’une écriture tremblante. L’auteur

Le général bosno-serbe Radislav Krstic, à La Haye, aux Pays-Bas, le 19 avril 2004.

« A chaque instant de chaque jour, je pense aux victimes du génocide de Srebrenica, je les pleure et je prie pour leurs âmes. » Les mots sont inscrits en bleu sur du papier d’écolier, d’une écriture tremblante. L’auteur est un général bosno-serbe. Il réside à la prison de Scheveningen, à La Haye (Pays-Bas). Radislav Krstic a été le premier responsable déclaré coupable pour le génocide des musulmans de Srebrenica commis lors de l’été 1995. Les juges du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) l’ont, en avril 2004, définitivement condamné à trente-cinq ans de prison.

Sa lettre est datée du 18 juin. Elle est annexée à sa demande de libération anticipée, adressée à la présidente du mécanisme de l’ONU chargé des derniers dossiers du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie, fermé en 2017. La décision des juges n’est pas encore connue. « Je sais, écrit-il, que les mères et les sœurs de victimes innocentes ne croiront pas que ces mots sont véridiques. » Le condamné les a rédigés presque un mois après l’adoption par l’Assemblée générale de l’ONU d’une résolution faisant du 11 juillet la journée internationale de réflexion et de commémoration du génocide perpétré à Srebrenica en 1995. « Même si je n’avais pas le droit de vote, j’aurais voté pour cette résolution », écrit le général Krstic. « Dans cette résolution, poursuit-il, mon nom est mentionné parce que j’ai aidé et encouragé le génocide (…), parce que j’ai commis un crime inimaginable et impardonnable ».

C’était à l’été 1995, juste avant l’opération Krivaja 95, destinée à reprendre les enclaves de Zepa et Srebrenica. Promu, Radislav Krstic devenait commandant du corps de la Drina. Du 11 au 21 juillet, les forces bosno-serbes du général Ratko Mladic s’emparaient de Srebrenica. Au site de Potocari, près du cantonnement des casques bleus néerlandais censés protéger l’enclave, les habitants furent triés : femmes et enfants d’un côté, hommes de l’autre. Les premiers furent déportés par autobus jusqu’aux territoires libres de Bosnie-Herzégovine. Les hommes furent embarqués sur d’autres sites : écoles, hangars, fermes. Là, yeux bandés, poignets entravés par des fils de fer, près de 8 000 d’entre eux, tous musulmans, furent assassinés un à un.

« Le génocide a été commis par des individus »

« Je ne demande pas de pardon, je ne cherche pas de justification, écrit le condamné âgé aujourd’hui de 76 ans. Je ne cherche pas la compréhension parce que je sais que je ne peux pas les recevoir. » Mais, ajoute-t-il, « j’aimerais que mes mots soient lus et compris par les jeunes qui vivent aujourd’hui dans les régions où se trouvait autrefois un pays nommé Yougoslavie. (…) J’aimerais aussi que tous comprennent que le génocide ne peut pas être commis par une seule nation, qu’il n’y a pas de nations génocidaires, mais que le génocide de Srebrenica a été commis par des individus. (…) Malheureusement, je fais partie d’eux. »

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