John Lewis entouré de membres du caucus noir du Congrès lors d’une cérémonie d’hommage, au Capitole, à Washington, en octobre 2019. PABLO MARTINEZ MONSIVAIS / AFP
John Lewis, emblématique militant de la non-violence et des droits civiques aux Etats-Unis, ancien compagnon de route de Martin Luther King, et qui a poursuivi une longue carrière au Congrès, est mort, vendredi 17 juillet, à l’âge de 80 ans, des suites d’un cancer du pancréas.
La mort de « l’un des plus grands héros de l’histoire américaine » a été annoncée par la présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, dans un communiqué.
« John Lewis était un titan du mouvement des droits civiques dont la bonté, la foi et la bravoure ont transformé notre nation. (…) Que sa mémoire soit une inspiration pour que, tous ensemble, nous agissions face à l’injustice, que nous “causions de bons ennuis, des ennuis nécessaires”. »
John Lewis’s memory moves us all to, in the face of injustice, make “good trouble, necessary trouble.” May it be a… https://t.co/1hLSAhgRGV
— SpeakerPelosi (@Nancy Pelosi)
Une « icône »
La présidence américaine a rendu hommage à John Lewis, saluant une « icône » qui laissera « un héritage durable ». M. Lewis « était une icône du mouvement des droits civiques et il laisse un héritage durable qui ne sera jamais oublié », a affirmé la porte-parole de la Maison Blanche, Kayleigh McEnany, soulignant « les incroyables contributions qu’il a apportées au pays ».
Donald Trump s’est, lui, dit « attristé » par la mort de ce « héros des droits civiques », dans un message laconique illustrant le peu d’estime portée à celui qui avait boycotté son investiture en janvier 2017. Le président a aussi ordonné que les drapeaux soient mis en berne sur tous les bâtiments publics, y compris à la Maison Blanche.
« Peu d’entre nous vivent pour voir notre propre legs se développer d’une manière aussi remarquable et significative. John Lewis l’a fait », a réagi l’ancien président Barack Obama. M. Lewis « aimait tant son pays qu’il a risqué sa vie pour lui », a-t-il ajouté.
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Un « géant »
L’ancien président Bill Clinton et son épouse, l’ancienne secrétaire d’Etat Hillary Clinton, ont salué cet élu démocrate à la Chambre des représentants, un « géant » devenu « la conscience de la nation ».
Les hommages sont également venus du camp républicain, avec notamment Mitch McConnell, président du Sénat, qui a loué ce « pionnier des droits civiques qui n’a pas hésité à mettre sa vie en jeu pour combattre le racisme, promouvoir l’égalité des droits et placer notre nation en accord avec ses principes fondateurs ».
Le président français, Emmanuel Macron, a salué samedi la mémoire du militant américain en le qualifiant de « héros ». « Une vie de combat pour les droits civiques. Une vie à être de toutes les belles luttes, à se battre pour un monde plus juste. Tant de progrès ont été conquis grâce à lui. John Lewis était un héros », a tweeté M. Macron, postant une photo des deux hommes se donnant l’accolade.
Une vie de combat pour les droits civiques. Une vie à être de toutes les belles luttes, à se battre pour un monde p… https://t.co/RHRcYyFqeF
— EmmanuelMacron (@Emmanuel Macron)
Lors d’un déplacement d’Emmanuel Macron à Washington en 2018, John Lewis avait estimé que le président français se battait, selon lui, « pour la même société que celle voulue par Martin Luther King ».
Compagnon de route de Martin Luther King
John Lewis a été un compagnon de route du célèbre pasteur pacifiste Martin Luther King, mort assassiné en 1968. Fils de métayers, cet Afro-Américain était à 21 ans un des plus jeunes Freedom Riders (voyageurs de la liberté) qui ont combattu la ségrégation dans le système de transport américain au début des années 1960. Il est devenu l’une des voix les plus respectées du pays pour la justice et l’égalité.
Il était adolescent lorsqu’il a entendu pour la première fois King prêcher à la radio. Ils se sont rencontrés lorsque Lewis cherchait à obtenir du soutien pour devenir le premier étudiant noir à l’université d’Etat de Troy. John Lewis, qui était le plus jeune et le dernier survivant des six grands militants des droits civiques, était aux côtés du révérend Luther King Jr. lors du rassemblement d’août 1963 à Washington, où ce dernier a prononcé son célèbre discours « I have a dream ».
Il a plusieurs fois failli succomber sous les coups de la police, notamment en 1965 sur le pont Edmund-Pettus, à Selma, en Alabama, où il menait une marche pacifiste de plusieurs centaines de militants contre la discrimination raciale. En 2015, pour célébrer le cinquantenaire de ce « dimanche sanglant », il avait repassé le pont aux côtés du président Barack Obama.
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« La conscience du Congrès »
L’annonce de sa mort est intervenue quelques heures seulement après celle du révérend C. T. Vivian, un autre leader des droits civiques, qui est mort vendredi, à 95 ans.
John Lewis s’est tourné vers la politique en 1981, lorsqu’il a été élu au conseil municipal d’Atlanta. Parlementaire depuis 1986, il incarnait « la conscience du Congrès », selon l’expression de Nancy Pelosi.
Malgré un cancer, il avait fait son retour à Washington en juin en pleine tourmente née de la mort de George Floyd aux mains de la police à Minneapolis, pour participer à la mobilisation du mouvement Black Lives Matter contre les discriminations raciales.
Farouche opposant à Donald Trump
A la suite de l’élection de Donald Trump, il avait refusé d’assister, en janvier 2017, à la cérémonie d’investiture du président, déclarant qu’il ne le « considérait pas comme un président légitime ».
Donald Trump avait alors répliqué sur Twitter, estimant que John Lewis « ferait mieux de passer du temps à s’occuper d’aider sa circonscription, qui est dans un état déplorable et qui se désintègre (sans parler de la criminalité qui la gangrène) », s’attirant de très vives critiques.
Dans un discours prononcé le jour du vote à la Chambre des représentants relatif à la procédure de destitution de Trump, John Lewis avait expliqué l’importance de ce vote.
« Quand vous voyez quelque chose qui n’est pas juste, pas juste, pas juste, vous avez l’obligation morale de dire quelque chose, de faire quelque chose. Nos enfants et leurs enfants nous demanderont : “Qu’avez-vous fait ? Qu’avez-vous dit ?” » « Nous avons une mission et un mandat pour être du bon côté de l’histoire. »
La femme de Lewis, Lillian Miles, est morte en 2012. Ils ont eu un fils, John Miles Lewis.
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Le Monde avec AFP, AP Et Haiti24