Environnement : la France exhorte l’UE à restreindre drastiquement la part d’octocrylène dans les produits cosmétiques

Environnement : la France exhorte l’UE à restreindre drastiquement la part d’octocrylène dans les produits cosmétiques

Des échantillons de crème solaire distribués gratuitement, à Paris, en pleine vague de chaleur, le 18 juin 2025. MARTIN LELIEVRE/AFP Particulièrement vigilante sur les dangers de l’octocrylène, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) appelle l’Union européenne (UE) à « réduire drastiquement » la concentration autorisée de cette substance chimique dans les

Des échantillons de crème solaire distribués gratuitement, à Paris, en pleine vague de chaleur, le 18 juin 2025.

Particulièrement vigilante sur les dangers de l’octocrylène, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) appelle l’Union européenne (UE) à « réduire drastiquement » la concentration autorisée de cette substance chimique dans les cosmétiques, afin de « préserver l’environnement ».

« Chaque année, plus de 1 500 tonnes d’octocrylène sont utilisées dans les produits cosmétiques en Europe », expose l’Anses dans un avis. Ces produits contaminent les milieux aquatiques et les sols, ce qui entraîne « des risques inacceptables » pour « la reproduction et la croissance des espèces aquatiques » (crevettes, poissons, algues) et les organismes « terrestres ».

Cette molécule, utilisée comme « filtre UV [ultraviolets], absorbeur d’UV et photo-stabilisant » dans environ 30 % des produits solaires, mais aussi du maquillage, des crèmes de jour ou encore des parfums, « se retrouve dans les eaux usées domestiques », dans le sol via « les boues de station d’épuration » et « contamine aussi les lacs, rivières et mers côtières lors des baignades », fait valoir l’Anses.

Un possible perturbateur endocrinien

Au-delà de ses effets nocifs sur les espèces aquatiques, cette substance toxique, qui s’accumule et persiste dans l’environnement dans des quantités très élevées, suscite des inquiétudes pour la santé humaine. L’Anses évoque ainsi d’éventuels effets toxiques pour la thyroïde et la reproduction. L’octocrylène pourrait aussi être un perturbateur endocrinien, mais les industriels n’ont pas fourni à temps les données requises pour évaluer ce dernier risque, précise l’agence, qui scrute la substance depuis 2012.

Si « on en retrouve des quantités importantes dans les crèmes solaires », avec une concentration maximale de 10 % autorisée par la réglementation européenne, « les rejets dans l’environnement sont multiples » et dépendent « des types de produits, des volumes de vente », explique à l’Agence France-Presse (AFP) Stéphane Jomini, chef de projet scientifique à l’Anses.

Cette restriction aboutirait « en pratique à la suppression de la mise sur le marché » de cosmétiques contenant de l’octocrylène : l’Anses ne demande pas son interdiction car elle peut être présente comme impureté dans certains produits, mais à ce nouveau niveau maximal, ses propriétés seraient inefficaces.

Ayant évalué les « impacts socio-économiques » de cette mesure, l’agence juge « modérés » les surcoûts induits par une fabrication des produits solaires avec une « association de substances » alternatives : 39 millions d’euros par an de 2027 à 2036, soit 0,04 % des ventes de produits cosmétiques en Europe en 2023.

Une décision européenne attendue au plus tôt en 2027

Au regard des « marges actuelles des fabricants sur ces produits, ces coûts seraient absorbés sans trop de difficultés », dit à l’AFP Karine Fiore, directrice adjointe à la direction des sciences sociales de l’Anses. De fait, « il existe déjà depuis plusieurs années des crèmes solaires sans octocrylène », note-t-elle.

L’agence sanitaire a aussi mesuré l’acceptabilité par les consommateurs des éventuelles hausses de prix de ces produits, via une enquête auprès de 7 200 personnes dans six pays européens. Résultat : le prix qu’ils sont prêts à payer « dépasse largement les coûts engendrés par la restriction », attestant de « la volonté des Européens à agir pour améliorer la qualité des environnements aquatiques », selon elle.

La proposition élaborée par l’Anses, au nom de la France, intervient dans le cadre du règlement européen Reach, qui encadre la fabrication et l’utilisation des substances chimiques dans l’UE. Cette proposition est en consultation publique sur le site de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) jusqu’au 24 mars 2026. Ses deux comités (évaluation des risques, analyse socio-économique) devraient rendre leurs avis en septembre 2026, permettant à la Commission européenne de trancher sur l’application de cette restriction dans l’UE au plus tôt en 2027.

Le Monde avec AFP

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