Evens Paul appelle à une paix juste et à un chita pale national

Evens Paul appelle à une paix juste et à un chita pale national

« La paix n’est pas un slogan. Elle suppose le respect de la loi, la protection des citoyens et la justice pour les victimes. » — Evens Paul, ancien Premier ministre d’Haïti

À l’approche du 7 février 2026, date butoir fixée par l’accord du 3 avril pour la transition haïtienne, les incertitudes se multiplient. Le Conseil présidentiel de transition (CPT) peine à remplir son mandat : rétablir la sécurité, organiser un référendum, convoquer une conférence nationale et préparer des élections. Rien de tout cela n’a été accompli.

Face à cette impasse, l’ancien Premier ministre Evens Paul (Membre du Forum des Anciens Premiers Ministres) propose une lecture claire : la sortie de crise ne viendra pas de slogans ou de manœuvres politiciennes, mais d’une reconstruction de l’État et d’un dialogue national entre Haïtiens.


La paix, pas comme slogan mais comme exigence

« Faire la paix » n’a de sens que si cela s’accompagne d’actes concrets. Pour Evens Paul, la paix suppose le dépôt des armes, le respect de la loi, la protection des vies et des biens, et la reconnaissance de l’autorité de l’État.
Il rejette les discours de façade : « Il ne peut y avoir de paix sans justice ». Les victimes des violences — familles endeuillées, maisons brûlées, quartiers détruits — ne peuvent être ignorées dans une simple réconciliation de circonstance.

La paix doit être une tranquillité durable, et non une manœuvre pour sécuriser un pouvoir ou légitimer des acteurs armés.


L’État, garant permanent de la stabilité

Evens Paul rappelle un principe fondamental : l’État est permanent. Les hommes passent, mais les institutions doivent demeurer. Or, en Haïti, l’une des plus grandes crises réside dans la faiblesse de l’État, incapable de garantir sécurité, justice et services de base.

Cette faiblesse a laissé place à des arrangements informels, où des groupes armés se posent comme arbitres, et où la communauté internationale dicte souvent l’agenda. Pour l’ancien Premier ministre, il est urgent de ramener l’État au centre de la vie publique.


Un chita pale national, pas une solution importée

Plutôt qu’attendre de nouvelles résolutions de l’ONU, de la CARICOM ou de Washington, Evens Paul plaide pour un chita pale national. Ce dialogue doit rassembler les forces politiques, sociales et citoyennes autour d’une même table afin de tracer une voie de sortie proprement haïtienne.

Il reconnaît que certains acteurs sont controversés, voire impliqués dans des crimes. Mais cela ne doit pas bloquer l’organisation d’un espace de concertation. La justice doit suivre son cours, tout en permettant l’émergence d’un compromis politique.

La leçon est claire : après trente ans de missions internationales infructueuses, Haïti doit trouver ses propres réponses.


Le spectre du 7 février 2026

L’échéance de 2026 cristallise toutes les inquiétudes. Deux scénarios se dessinent :

  • -> soit le CPT prolonge son mandat au-delà de la date prévue, au risque d’un rejet massif,
  • -> soit le pays s’enfonce dans un vide institutionnel, avec un gouvernement sans légitimité et une population livrée à la violence.

Dans les deux cas, le risque est celui d’une crise encore plus profonde. Evens Paul appelle donc à anticiper dès maintenant en organisant une concertation nationale pour éviter l’explosion.


La justice, condition de la réconciliation

L’ancien Premier ministre insiste sur un point central : la paix sans justice est une illusion. Les crimes commis — meurtres, pillages, incendies — ne peuvent être balayés au nom d’une fausse réconciliation.


Il appelle à des mécanismes permettant de reconnaître les victimes, de sanctionner les responsables et de restaurer la confiance. Sans cela, la paix resterait une simple couverture pour l’impunité.


Un avertissement et une invitation

Evens Paul n’encourage ni la résignation ni la violence. Son message est double :

  • Avertissement, car sans dialogue et sans plan, le pays court vers un vide institutionnel et un cycle de violence encore plus destructeur.

  • Invitation, car il ouvre une voie : celle d’un chita pale national, d’une paix accompagnée de justice, et de la reconstruction d’un État digne de ce nom.

Conclusion

Haïti ne peut se permettre une transition sans fin, ni une nouvelle tutelle internationale. La solution ne viendra pas de l’extérieur. Elle ne viendra pas non plus d’arrangements partisans visant seulement à prolonger le pouvoir.

L’appel d’Evens Paul est une leçon de responsabilité : la paix doit être réelle et juste, l’État doit redevenir le garant permanent, et les Haïtiens doivent construire ensemble une sortie de crise.


Sans cela, le 7 février 2026 risque de n’être qu’une date de plus dans la longue histoire des occasions manquées.

Haiti 24
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